Rencontre USM-DACS

23 novembre 2023

Le DACS, Rémi Decout-Paolini, a souhaité institutionnaliser des rencontres semestrielles entre la DACS et notre organisation syndicale. Nous l’avons rencontré une première fois le 24 janvier 2023 (compte-rendu à retrouver ici). Nous l’avons revu avec son équipe le 14 novembre 2023, l’USM étant représentée par Cécile Mamelin, vice-présidente, et Natacha Aubeneau, secrétaire nationale.

Nous avons abordé de nombreux sujets : la mise en œuvre de l’ARA et de la césure du procès civil ; la réforme de la procédure d’appel ; la perte des compétences civiles du JLD ; les ajustements procéduraux préconisés en JAF ou JME.

Bien que parfaitement conscientes que ces sujets ne relèvent pas de la compétence de la DACS, nous avons néanmoins tenu à dénoncer l’accroissement à moyens constants de la charge de travail des collègues civilistes (politique de l’amiable, transfert des compétences du JLD civil, multiplication des missions des JCP) et l’inadéquation (wordperfect, winci) ou l’absence (calcul des délais des mesures d’isolement et contention) des outils informatiques.

Nous lui avons indiqué que la phrase de la circulaire du 17 octobre 2023 sur la politique de l’amiable relative à la prise en compte, au titre de l’évaluation et de la prime modulable, de la participation des magistrats à cette politique publique était pour nous une ligne rouge, que nous souhaitions une modification de la circulaire sur ce point en ce qu’elle porte atteinte à l’indépendance juridictionnelle du juge. Il nous a renvoyés à saisir la DSJ de cette question… ce que nous allons faire, et préparer un projet de recours contentieux contre ce texte.

Le reste des échanges a été enrichissant. La DACS nous a consultés au cours du semestre écoulé sur divers sujets. L’USM a été très largement entendue et suivie en ses observations. Un tableau reprenant nos préconisations sur la réforme de la procédure d’appel, et précisant ce qui en a ou non été retenu, nous a été remis. Vous trouverez ci-dessous le compte-rendu détaillé de cette rencontre.

L’USM se félicite de ces échanges réguliers et constructifs avec la DACS.

ARA et césure du procès civil

Sans critiquer ces dispositifs qui peuvent évidemment avoir un intérêt, nous avons dénoncé le manque de moyens, d’effectifs, d’outils, de formation, de temps, pour s’en saisir efficacement.

Le DACS nous a indiqué que la circulaire du 17 octobre 2023 se veut avant tout pratique, que toutes les trames sont prêtes, accessibles directement via des liens hypertexte dans la circulaire, de même que la nouvelle nomenclature qui permettra d’évaluer la pertinence du dispositif. Des praticiens, nommés ambassadeurs de l’amiable, vont aller à la rencontre des collègues pour les aider à mettre en place ces nouveaux dispositifs. Il nous a remis une fiche de présentation du dispositif des ambassadeurs de l’amiable et un calendrier de leurs déplacements fixés dans les juridictions. Une foire aux questions va être ouverte.

Un travail conjoint est mené par la DACS avec l’ENM pour incorporer l’amiable à la formation initiale et à la formation déconcentrée, que le TJ de Paris s’est déjà saisi du dispositif.

Se voulant rassurant, le DACS a expliqué que l’idée est d’offrir de nouveaux dispositifs dans le champ de l’amiable, pas de désorganiser les juridictions, qu’il faut une adaptation progressive, que les effectifs vont augmenter, que les MH et MTT vont être mobilisés sur ce nouvel outil, que les textes ont déjà été adaptés en fonction de remontées des juridictions et qu’ils feront l’objet de nouvelles adaptations si nécessaire.

Le DACS s’est engagé à ce que ce dispositif reste facultatif, affirmant qu’il n’a jamais été pensé comme pouvant devenir obligatoire, qu’il dépend du choix juridictionnel de chaque magistrat, que l’idée est de mettre à disposition des collègues les outils pour pouvoir y recourir, en mesurer les effets, les bénéfices.

La DACS, assurant ne pas ignorer les difficultés des juridictions, plaide pour différer l’entrée en vigueur des textes civils afin de laisser le temps aux juridictions de les mettre en place, de mettre à leur disposition des outils pratiques en temps utile.

FAQ, lettre de la DACS

L’USM a rappelé son souhait de mettre en place une FAQ plus large que pour les seules questions relatives à la politique de l’amiable, adossée à un outil de recherche qui permette de retrouver les réponses aux questions déjà posées. La DACS y réfléchit, ayant précisé que les collègues saisissent déjà les bureaux dédiés à certains contentieux (famille, immobilier, nationalités…) mais qu’en effet, il n’existe pas d’outil permettant de centraliser et de retrouver les réponses apportées. Cet objectif pourrait être réalisé dans le cadre de la refonte du site justice.fr en mutualisant les réponses aux questions pour pouvoir les partager avec tous.

Dans l’attente, la DACS publie régulièrement une newsletter qui va intégrer des focus sur des points procéduraux qui méritent d’être précisés. C’est ainsi que la prochaine lettre pourrait répondre à certaines questions que nous lui avons soumises :

  • La procédure applicable en divorce à la révision des mesures provisoires reste la procédure orale ;
  • Sur la compétence du JME sur une FNR soulevée dans une instance introduite par assignation délivrée avant le 1er janvier 2020, par une partie appelée en cause postérieurement à cette date : cette compétence est applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020 (article 55-II), donc pas aux instances introduites avant, même en cas d’intervention forcée postérieure ;
  • Sur la pratique d’une communication des dates d’audience de protection JAF par téléphone : c’est contraire au texte puisque c’est l’ordonnance qui vaut convocation, ordonnance qui doit être rendue sans délai. Une solution pourrait venir de la signature électronique avec l’expérimentation en cours du minutier électronique.

JLD civil

Nous avons fait part à la DACS de nos craintes relatives à la déspécialisation des fonctions civiles du JLD. Il existe un risque de pratiques disparates selon les juridictions, selon que ce contentieux restera assigné aux JLD ou confié à d’autres collègues non JLD, avec un risque d’éclatement de ce service pourtant très technique qui requiert une réelle expertise mais qui est peu attractif.

Le contrôle des mesures de contention et d’isolement est mal compris par les services hospitaliers, sans doute parce qu’inadapté à leurs pratiques et conditions de travail mais aussi parce qu’ils ne disposent pas des outils numériques qui permettraient de faciliter ce contrôle. Le contrôle est souvent vidé de son sens et de sa substance soit parce qu’il intervient parfois alors même que la mesure est déjà levée, ou qu’il y est fait obstacle parce que le juge n’est pas informé de la reprise d’une mesure, soit au contraire parce que même si le contrôle conduit à la mainlevée de la mesure comme contraire aux textes, la décision du JLD n’est pas respectée.

Nous avons dénoncé l’absence de cohérence des textes quant à la possibilité de recourir à la visio conférence en matière de contrôle des mesures d’isolement mais pas en audience de soins contraints. Nous avons appelé à la clarification du cadre juridique des auditions en matière d’isolement et contention, souhaitant que cette audition puisse se faire avec un greffier, dans un cadre garantissant la sérénité des débats et la dignité de la personne.

Nous avons rappelé que l’objectif de protection des libertés fondamentales des patients est loin d’être atteint et que le sentiment d’inutilité pour le JLD est d’autant plus difficile à vivre que la procédure, mise en place sans réelle étude d’impact, est particulièrement chronophage tant pour le magistrat que pour son greffier.  

La DACS nous a assurées avoir conscience de ces difficultés.

Projet de décret réformant la procédure d’appel

Le décret est devant le CE. Il sera soumis au CSA-SJ de décembre. Une consultation est en cours sur cette dernière version du projet, qui peut encore être amendé avant le CSA-SJ.

L’USM avait consulté ses adhérents sur le premier état du projet (retrouvez ici notre contribution). La DACS a retenu beaucoup des remarques remontées par l’USM, et a dressé un tableau reprenant nos préconisations, ce qui en a ou non été retenu.

Ont notamment été retenues les observations suivantes :

  • Maintien des sanctions (caducité de la déclaration d’appel, irrecevabilité des conclusions) ;
  • Restructuration des dispositions du CPC afin de distinguer clairement les dispositions applicables à la mise en état et celles en matière de procédure à bref délai ;
  • Incitation au recours à la mise en état conventionnelle par la fixation prioritaire de l’affaire ;
  • Possibilité de dispense de plaidoirie en procédure à bref délai ;
  • Unification sans allongement des délais pour conclure, soit 2 mois en mise en état classique comme en procédure à bref délai ;
  • Pas d’extension de la compétence du CME à la recevabilité des prétentions nouvelles ;
  • Suppression de la condition tenant au caractère exceptionnel du rapport pouvant être fait par un autre magistrat que le CME ;
  • Clarification des pouvoirs juridictionnels du président de chambre.

Nous nous sommes félicités de la méthode retenue par la DACS, d’une vraie consultation et prise en compte des remontées de l’USM et du terrain.

Projet de décret Magicobus (fourre-tout)

La DACS nous avait déjà présenté ce projet en janvier. L’idée est de disposer d’un vecteur pour porter les souhaits d’améliorations textuelles des collègues sur des sujets ponctuels, techniques. Ce décret aurait vocation à être modifié tous les ans, voire 2 fois par an.

3 sujets pourraient y être insérés :

  • Simplification du traitement des fins de non-recevoir :

L’USM a appelé de ses vœux la réforme de l’article 789 CPC sur la possibilité de donner pouvoir au juge du fond de trancher les FNR. La DACS admet que la réforme de 2019 donnant compétence exclusive au JME a créé des difficultés importantes. Plusieurs solutions envisagées : revenir à la situation antérieure avec les mêmes écueils ou joindre en quelque sorte l’incident au fond : cette proposition de l’USM sera retenue. A aussi été envisagée la possibilité d’un appel immédiat, sur laquelle l’USM a émis de vives réserves.

L’USM a rappelé la nécessité de donner les moyens à une véritable mise en état intellectuelle, seule de nature à favoriser le tri et l’orientation des dossiers vers les modes amiables de règlement des litiges.

  • Sécurisation du régime de la péremption d’instance en appel après la clôture : les avocats se voient imposer de faire des actes pour éviter la péremption, ce qui n’est pas très juste. Ce système va être modifié.  
  • IFPA : le principe de l’intermédiation ne sera pas remis en cause, mais va être introduite une définition de l’extrait exécutoire dans le code pour se caler sur la pratique du greffe afin de leur offrir la sécurité juridique nécessaire, avec une exception au principe de notification par LRAR quand on sait que le défendeur est défaillant.

Décision attendue du Conseil constitutionnel sur le PLOPJ :

La décision est attendue ce jeudi 16/11. La DACS n’a pas d’inquiétude sur les dispositions civiles, sauf sur le legal privilege.

Vous pourrez lire ici notre contribution extérieure déposée devant le Conseil constitutionnel pour contester différents points des projets de loi, notamment sur le legal privilege.

Après la décision du Conseil, il faudra alors préparer les décrets sur 2 sujets notamment : saisie des rémunérations (décret attendu pour le 1er juillet 2025) ; retrait des attributions civiles du JLD qui implique un gros travail de modification des textes.