L’USM intervient très fréquemment sur la matière pénale tant certaines infractions commises suscitent la volonté de réforme de nos gouvernants.
Récemment, nous avons pu nous prononcer sur 3 thèmes importants :
- le droit pénal des mineurs,
- la lutte contre la criminalité organisée
- le droit des peines.
S’agissant du droit des mineurs, nous avons souvent rappelé que la très grande majorité des professionnels de l’enfance en danger et délinquante n’émettent pas le souhait d’une nouvelle réforme, la mise en œuvre du code de la justice pénale des mineurs remontant à septembre 2021. Les outils juridiques pour répondre à la plupart des situations visées existent.
Ainsi nous avons pu dire par exemple que l’idée d’une comparution immédiate des mineurs n’avait pas de sens et était un outil de communication. S’il est loisible de s’interroger sur les conditions du placement en détention provisoire et des conditions du recours à l’audience unique, calquer une procédure sur celle prévue pour les majeurs n’est pas opportune.
Nous avons soutenu la césure dès lors que dans certaines conditions les moyens juridiques pour y déroger existent. Nous nous sommes également opposé à la suppression de l’excuse de minorité ; la loi actuelle permet déjà de l’écarter selon les circonstances de l’espèce et les peines prononcées ne se heurtent que très rarement, pour ne pas dire jamais, au maximum légal. En revanche, nous avons toujours insisté sur les conséquences des carences des pouvoirs publics en termes de moyens attribués à la justice des mineurs.
S’agissant de la lutte contre la criminalité organisée, l’USM a la première par un courriel du 28 mars 2024, largement diffusé, remis ce sujet au cœur des débats. Nous écrivions alors que « la teneur des propos exprimés par nos collègues marseillais devant la commission sénatoriale n’a été une surprise que pour ceux qui ignorent ces réalités ou ne veulent pas les voir. Loin d’être étonnants, ils sont l’affirmation du danger majeur pour notre démocratie que constituent le crime organisé et les réseaux mafieux. D’autres pays proches de nous (la Belgique et les Pays-Bas) paient cher leur absence de réaction face à la montée en puissance des groupes criminels. L’Italie quant à elle a payé du sang de policiers et magistrats l’emprise de la mafia avant de prendre des mesures ».
Dès cet appel, nous proposions de :
- repenser le statut du repenti ;
- élargir le champ des cours d’assises spéciales, voire des cours criminelles départementales, dans le domaine de la criminalité organisée ; peut-être faudrait-il également se pencher sur le régime carcéral des condamnés à ce type d’infraction afin de casser la direction des réseaux une fois les intéressés incarcérés ?
- repenser l’infraction d’association de malfaiteurs ; l’exemple italien, pays de tradition juridique proche et soumis aux mêmes exigences européennes, mérite d’être exploré, notamment en ce qu’il prévoit l’association de malfaiteurs de nature mafieuse (article 416 bis du code pénal italien) ;
- renforcer l’arsenal judiciaire permettant de sanctionner plus efficacement la destruction de preuves ainsi que la violation du secret de l’enquête ;
- mettre la lutte contre les aspects financiers de cette criminalité au cœur des priorités car il ne s’agit pas seulement de sanctionner des individus, mais de détruire des organisations dont l’objectif ultime est de supplanter l’Etat.
Au cours des débats devant les assemblées, nous avons ensuite été entendus à de multiples reprises et fourni des notes écrites.
En ce domaine, nous étions porteurs d’une réponse maximaliste et avons été déçus par la loi telle que sortie de l’Assemblée nationale. Même si certaines de nos propositions formulées dès le printemps 2024 ont été reprises, nous continuerons de soutenir celles qui ne l’ont pas été.
Ainsi par exemple :
- Le dossier confidentiel qui est un outil juridique qui permet, sous le contrôle d’un juge de ne pas révéler les procédés permettant d’avoir recours à des techniques spéciales d’enquête nous paraît devoir être retravaillé pour être proposé de nouveau. Ce dispositif existe déjà en Belgique.
- La loyauté dans le débat judiciaire est un corolaire du contradictoire. La discussion contradictoire implique la loyauté. Les manœuvres pour obtenir une décision, les stratagèmes tendant à tromper ou à provoquer une nullité ne sont pas une discussion loyale. Le débat judiciaire doit être exempt de ce type de supercherie et il appartient au législateur de l’écrire clairement dans la loi. Nous continuerons de le porter
- Le régime des nullités mérite aussi d’être révisé. Il appartient sans doute au législateur de définir quels manquements aux règles qu’ils imposent doivent emporter une nullité. Il est également de sa compétence de déterminer la portée des nullités et d’en circonscrire éventuellement les effets.
En cette matière comme dans d’autres, nous nous gardons de toute naïveté. La protection de nos droits et libertés ne pourra être effective dans un pays où l’emprise mafieuse est telle qu’elle corrompt plusieurs pans de la société, dirige l’économie réelle, intervient sur le cours des élections et fait régner l’insécurité. Ces réflexions n’empêchent pas, au contraire, de prendre également en compte les problématiques de santé publique et de désinsertion sociale rencontrées par certains consommateurs de stupéfiants en prise à une addiction.
S’agissant du droit de la peine, l’USM s’est attachée à redonner du pouvoir et de la liberté au juge, notamment au juge correctionnel. Nous avons soutenu la peine de probation à la condition qu’elle soit suffisamment contraignante pour être perçue comme une vraie peine par nos concitoyens. Il y va de la crédibilité de la justice pénale. Par ailleurs, si la peine doit être lisible et effective, aucun débat en cette matière ne peut être décorrélé de la situation carcérale. La France emprisonne dans la moyenne européenne (nombre de détenu pour 100.000 habitants) mais connaît le troisième plus fort taux de surpopulation carcérale. Il est vrai que les peines ont largement augmenté ces dernières années, balayant au passage le prétendu laxisme des magistrats.
Nous continuerons de porter ces arguments techniques et de répondre aux nombreuses sollicitations parce que le point de vue des magistrats ne devrait jamais être passé sous silence à propos de ces questions.

