Syndicalisme judiciaire

8 mai 2023

Le bureau de l’Union Syndicale des Magistrats (USM) a pris connaissance avec stupéfaction des déclarations du 4 mai 2023 sur Public Sénat de M. Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains (LR) au Sénat.

Communiqué de presse du 5 mai 2023

Le bureau de l’Union Syndicale des Magistrats (USM) a pris connaissance avec stupéfaction des déclarations du 4 mai 2023 sur Public Sénat de M. Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains (LR) au Sénat, proposant d’interdire le syndicalisme dans la magistrature et prônant la réforme d’un Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM), décrit comme corporatiste, afin de « renforcer la réponse pénale » et « dépolitiser la magistrature ».

L’USM rappelle :

– qu’elle est, par ses statuts, apolitique et que son objet syndical consiste à défendre les intérêts de la profession, à lutter pour l’indépendance de la Justice et pour une justice de qualité au service de nos concitoyens. L’USM précise être très largement représentative au sein de la profession, totalisant près de 63% des suffrages aux dernières élections professionnelles ;
– que le droit pour les magistrats, judiciaires comme administratifs et financiers, de se syndiquer a valeur constitutionnelle et que les dernières « purges » destinées à dépolitiser la magistrature remontent aux années 1880, visant les royalistes, et 1940, visant les juifs, les gaullistes et les communistes. ;
 – qu’entre 2007 et 2012, sous la présidence de N. Sarkozy, les effectifs de la magistrature ont été réduits, tout comme ceux de la police nationale, avec notamment des promotions d’auditeurs de justice (élèves magistrats) n’assurant pas le remplacement des départs à la retraite. Les budgets de la Justice alors votés par sa majorité ont maintenu l’institution dans un état de « clochardisation » plusieurs fois dénoncé, et encore dernièrement par les États Généraux de la Justice.

L’USM réaffirme :

 – que le renforcement de la réponse pénale, mais également l’exercice d’une justice de qualité au pénal ET au civil, dépendent avant tout des moyens alloués par les pouvoirs politiques : une justice pauvre est une justice qui n’a pas les moyens de son indépendance ;
– qu’il y a en France deux fois moins de juges et trois fois moins de procureurs que dans les pays européens à niveau de richesse comparable (Chiffres CEPEJ : France 3 procureurs et 10,9 juges / 100 000 habitants ; moyenne Groupe C : 8 procureurs et 17,7 juges / 100 000 habitants ; moyenne européenne : 11,25 procureurs et 21,4 juges / 100 000 habitants).

L’USM rappelle enfin que le Conseil supérieur de la magistrature, loin d’être un condensé d’entre-soi aux mains des syndicats, n’est plus depuis 2010 composé d’une majorité de magistrats, comme il se devrait de tout organe disciplinaire, mais est majoritairement constitué, dans ses formations siège et parquet, de membres extérieurs désignés par des autorités politiques et administratives, loin des standards européens.

L’USM estime que l’enjeu d’une justice de qualité, garante de la paix sociale, mérite mieux que des attaques stériles et infondées dont le but inavoué est d’assurer la prééminence des pouvoirs exécutifs et législatifs sur l’autorité (pouvoir) judiciaire. Aucune démocratie ne gagne à affaiblir son pouvoir judiciaire ni à discréditer ses magistrats.